Nous sommes partis à la rencontre d'athlètes de haut niveau qui nous ont tous impressionnés par leurs performances, leur persévérance, leur résilience.
Avec eux, nous avons voulu briser les tabous sur la santé mentale. Car les plus grandes réussites ne sont jamais linéaire.
C'est de là qu'est né notre podcast, Les Secrets du Mental.
Ci-dessous notre échange avec Alizé Cornet, joueuse de tennis professionnelle. Pour écouter l'épisode de podcast, c'est par ici.
Merci à toi Alizé de prendre du temps pour parler de santé mentale aujourd’hui.
Mais avant ça je te propose de te présenter ?
Alizé Cornet : Je m’appelle Alizé Cornet, j’ai 32 ans. Je suis joueuse de tennis professionnelle depuis 2006. Je suis restée quasiment toute ma carrière dans le top 100. Et puis je suis aussi romancière. J’ai mon premier roman qui est paru aux éditions Flammarion en début d’année donc j’arrive à concilier mes deux carrières et je trouve ça très épanouissant.
Pourquoi as- tu accepté de parler de santé mentale aujourd’hui ? Est-ce un sujet important pour toi, dans quelle mesure ?
Alizé Cornet : Je pense qu’on a un peu sous-estimé l’ampleur que ça pouvait avoir dans la carrière et dans la vie d’un athlète. On parle souvent — surtout en France — de tactiques, de techniques, de beaux gestes. Le mental est un sujet sur lequel on est sensibilisé que depuis récemment. Alors qu’on a tous galéré, à notre échelle, à devenir un athlète de haut niveau. Je voulais en parler aujourd’hui car j’ai moi-même fait face à ce genre de problèmes et je les ai surmontés, tant bien que mal.
Est-ce que tu penses que les meilleurs joueurs de tennis sont ceux qui ont le plus gros mental ou est-ce quelque chose que l’on doit relativiser ?
Alizé Cornet : Je pense qu’il y a une forte corrélation. Je pense même qu’il y des joueurs qui ont certaines “limites techniques” mais qui s’en sortent parce qu’ils ont un mental à tout épreuve, qu’ils sont d’une résilience hors normes, qu’ils sont très concentrés, qu’ils sont imperméables à l’extérieur, à l’environnement, qu’ils sont très forts sur ce qu’ils peuvent contrôler et qu’ils lâchent prise ce qu’ils ne peuvent pas contrôler. Bref, je pense que le mental, c’est le paramètre numéro 1 alors que je le mettais en dernier dans ma préparation. C’est pour ça que j’ai appris à inclure la médiation et pleins d’outils mentaux pour progresser à ce niveau-là.
Cette idée de te mettre à la méditation - d’où est-ce que ca te vient ?
Alizé Cornet : Ca faisait un petit moment que j’entendais Novak Djokovic faire l’apologie de la méditation, de la visualisation, et je voyais comment ca le réussissait bien sûr. Mais c’est surtout une rencontre qui m’a permis de réaliser les bienfaits de la méditation. J’ai rencontré un auteur qui s’appelle Jonathan Leman qui a entre autres écrit ‘Journal intime d’un touriste du bonheur”. Je l’ai contacté et on a sympathisé. C’est lui qui m’a mis à la méditation. J’en ai rapidement senti les bienfaits.
Est-ce que ça fait maintenant partie de ta routine de préparation avant un match ?
Alizé Cornet : Juste avant les matchs, j’essaye vraiment de me prendre un temps calme d’environ 5-10 minutes pour me mettre dans ma bulle. Je me concentre sur ma respiration, me reconnecte au moment présent. Être dans le jeu : je suis, je fais.
La méditation me permet aussi de me rappeler pourquoi je fais ce sport. Après des années, on a tendance à oublier.
Tu as battu la numéro 1 mondiale, Iga Swiatek, à Wimbledon en 2022 alors qu’elle était sur une série de 37 victoires consécutives. Est-ce que tu as ressenti de la pression durant le match, ou as-tu réussi à rester dans ta bulle ?
Alizé Cornet : Alors malheureusement c’est pas si simple que ça : c’est un peu en dents de scie. Il y a des matchs où j’ai l’impression d’être dans ma bulle. J’ai cette impression que rien ne pourra me sortir de cet état de concentration extrême. Dans ces moments-là, j’ai l’impression que je peux juste exprimer mon meilleur tennis. Mais quand je dis en dents de scie c’est que, bien que j’ai été assez constante dans ma carrière, je n’ai jamais réussi à me mettre de façon systématique dans cet état de concentration, comme le fait Rafael Nadal par exemple.
Et justement pour construire cette force mentale, as-tu déjà eu un préparateur mental pour t’aider ?
Alizé Cornet : C’est vraiment la découverte de la méditation, qui n’est pas de la préparation mentale à proprement parler. Mais pour moi, c’est ce qu’il fallait.
Comment expliques-tu ton “fighting spirit” ? Comment l’entretiens-tu ?
Alizé Cornet : Le tennis c’est un sport qui entraîne beaucoup de montagnes russes. C’est obligatoire qu’il y ait de la lassitude au cours d’une carrière. J’ai pensé à arrêter le tennis beaucoup de fois, en me demandant si c’était vraiment le chemin qui me rendait heureuse. La concurrence est extrême, la pression est immense. Mais je suis faite pour ça. C’est une sorte d’évidence finalement.
Est-ce que tes proches t’ont permis d’aller plus loin, de poursuivre quand tu commençais à perdre pied ?
Alizé Cornet : J’ai toujours été le moteur de ma carrière mais ma famille a toujours été là. C’est une chance, et la clé de ma longévité.
Tu es arrivée tôt sur le circuit. Comment as-tu vécu autant de pression à 15 ans ?
Alizé Cornet : A 15 ans j’avais tout à prouver et rien à perdre. Personne ne m’attendait. J’avais évidemment la boule au ventre, mais pas la sensation d’être écrasée par la pression. Après, quand à 18 ans je suis devenue numéro 1 en France, ce n’était plus du tout la même chose. C’est là où mentalement, ça a commencé à se compliquer.
En tant que sportive de haut niveau, il y a nécessairement beaucoup de défaites. Les défaites viennent réguler la vie d’un sportif. Comment as-tu réussi à construire ton rapport à la défaite ?
Alizé Cornet : J’ai une relation avec la défaite qui a été absolument horrible toute ma carrière. A chaque défaite, quasiment à chaque défaite, c’est mon monde qui s’écroule. Alors ça peut être pour une soirée, une journée, deux jours…parfois ce sont des défaites qui viennent me hanter pendant une semaine.
Mais elle fait partie de la vie d’un athlète. Et il faut la détester, oui, mais surtout apprendre à rebondir, s’en servir pour avancer.
J’ai toujours eu une relation très compliquée avec la défaite et c’est pour ça que j’avais du mal à rester dans l’instant présent. J’étais en proie à des émotions très fortes.
Et au final, il s’est passé un truc cette année qui a changé ma vie et qui fait que j’ai pas du tout le même rapport à la défaite. J’ai eu une rupture amoureuse très douloureuse. J’ai réalisé qu’une défaite c’était rien dans une vie. Donc là, quand je perds, en une heure c’est oublié. C’est radical. Et finalement, c’est assez paradoxal : la meilleure façon d’avoir du résultat c’est de ne pas donner trop d’importance au résultat.
Est-ce que tu as eu des moments où tu as hésité à arrêter le tennis ? De gros moments de doute ?
Alizé Cornet : Quand je suis montée à mon meilleur classement à 19 ans — j’étais 11eme mondial. Et là j’ai commencé à perdre. J’ai perdu confiance en moi. Je faisais vraiment face à l’”échec”. J’ai commencé à très mal le vivre. J’ai même fait je pense une petite dépression. J’avais peur de faire autre chose de ma vie. Le tennis était tellement présent dans ma vie que je n’arrivais pas à me dire que finalement j’allais arrêter.
Écrire un roman, est-ce que ça a changé ton regard sur toi-même ?
Alizé Cornet : J’avais déjà beaucoup avancé sur l’amour de soi. J’ai travaillé pour détacher la joueuse de tennis et la personne. Me voir en tant que romancière, c’est surtout que ça me rassure aussi pour l’après-carrière.
Et quel rapport entre le plaisir et la performance ? Est-ce parfois pour sur-performer, il ne faut pas mettre de côté cette notion de plaisir ?
Alizé Cornet : Il y a quand même beaucoup de souffrance physique quand on fait du tennis. Il faut être souple, explosif, endurant, puissant… il faut tout travailler. Mais quand je suis sur le cours, je vis des moments rares et hors du commun, et c’est ça qui me procure du plaisir.
Est-ce qu’il y a un sujet auquel tu penses et que nous n’avons pas adressé dans cet épisode ?
Alizé Cornet : Je voudrais juste adresser un message aux jeunes joueurs. Il ne faut jamais perdre de vue qui on est vraiment, profondément. Et ceux qui nous entourent. Car la vie – la vraie vie – ce n’est pas notre carrière. Des gens comme Roger our Rafael
Donc si j’avais juste un petit conseil pour des jeunes athlètes c’est vraiment de se souvenir de qui on est profondément. Il ne faut pas oublier que la vie elle n’est pas là, finalement. Des gens comme Rafael, Roger, ont des valeurs humaines très fortes. C’est ça qui rend le champion d’autant plus exceptionnel.
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